OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Silent Circle brouille l’écoute http://owni.fr/2012/11/06/silent-circle-brouille-lecoute/ http://owni.fr/2012/11/06/silent-circle-brouille-lecoute/#comments Tue, 06 Nov 2012 08:35:54 +0000 Jean Marc Manach http://owni.fr/?p=124870

Dans les années 90, Philip Zimmermann s’était attiré les foudres des autorités américaines parce qu’il avait rendu public un logiciel permettant de chiffrer ses données, “Pretty Good Privacy“, et donc de communiquer en toute confidentialité. Désormais considéré avec Tim Berners-Lee, Vint Cerf et Linus Torvalds comme membre majeur de l’Internet hall of fames, Zimmermann s’est embarqué dans une nouvelle aventure : Silent Circle.

Son principe : permettre à quiconque, grâce au protocole ZRTP, le chiffrement de ses mails, de ses appels, de ses SMS et de tout ce qui transite globalement en VOIP sur son smartphone pour 20 dollars par mois. Et qui autorise y compris le “paiement anonyme”, grâce à ce qu’ils appellent la “Dark Card” : une carte métallique noire de 6 ou 12 mois, dont chacun peut acquérir le nombre qu’il souhaite, entièrement anonyme – sans nom ni adresse – avec un identifiant unique à 16 caractères. Le tout accompagné de mentions légales d’une grande transparence.

“This is designed for the citizens of the world”

“Conçu pour les citoyens du monde”, clame le PDG de Silent Circle, Mike Janke – ancien Navy SEAL – qui se défend de ne pouvoir être à la fois juge et juré, conscient que ce nouveau produit pourrait très bien être utilisé par des individus malveillants. Mais Janke assène également l’adage selon lequel “tout ce que vous faites ou dites – mail, SMS, téléphone – est surveillé à un niveau ou à un autre”. Et il refuse donc l’idée d’en priver les 99% de citoyens qui en feront un usage correct pour protéger leur vie privée.

Pour l’heure, la firme prétend avoir déjà reçu une commande en provenance d’une multinationale pour 18 000 de ses employés, et suscité de l’intérêt d’unités d’opérations spéciales et d’agences gouvernementales de plusieurs pays. Et le célèbre pure player spécialisé en journalisme d’enquête d’intérêt public ProPublica a confirmé avoir entamé des “discussions préliminaires” avec Silent Circle, sans doute avec pour objectif de protéger à la fois ses journalistes ainsi que leurs sources. A priori destinée à un public restreint – celui cité, plus quelques activistes, des diplomates, voire des stars qui se font voler leur mobile contenant des données sensibles – Silent Circle pourrait finalement toucher un public plus large. C’est ce que souhaiterait sans doute Philip Zimmermann.

Philip Zimmermann, portrait by Matt Crypto (CC-by-sa)

Philip Zimmermann, décrivez Silent Circle en quelques mots.

Silent Circle sécurise les télécommunications de ses utilisateurs. Nous ne vendons pas nos produits aux institutions, mais aux utilisateurs finaux, qui peuvent cela dit travailler pour des institutions, et se faire rembourser l’abonnement.

Comment est né le projet ?

J’ai été contacté à la fin de 2011, par Mike Janke, qui voulait lancer Silent Circle, au sujet duquel il pensait depuis des mois, peut-être des années, afin de développer des outils de chiffrement des télécommunications. L’un des premiers marchés qu’il voulait approcher, ce sont les militaires américains déployés à l’étranger, afin de leur permettre de pouvoir parler à leurs familles, parce qu’ils n’ont pas le droit d’utiliser Skype, de dire où ils sont, parce qu’ils doivent utiliser un langage codé pour communiquer… ils ont tellement de restrictions, et comme ils ne peuvent pas non plus utiliser les réseaux de communication sécurisés du Pentagone…

On peut aussi penser aux employés des sociétés militaires privées qui sont, eux aussi, déployés à l’étranger, aux professionnels envoyés dans des pays où ils pourraient être espionnés, comme la Chine par exemple… Et j’ai trouvé que c’était une formidable marché tout trouvé qui pourrait s’élargir au fur et à mesure. En créant des outils censés servir dans des environnements très hostiles, afin d’aider des agences gouvernementales à s’en servir, il deviendrait d’autant plus difficile de nous stopper, en particulier en matière de téléphonie par IP, où nous allons probablement devoir mener des combats juridiques assez controversés dans les prochaines années. Et cette start-up nous facilitera ces combats législatifs ou judiciaires, du simple fait que nous aurons beaucoup de clients au sein des agences gouvernementales…

Qu’est-ce que cela fait, pour un pacifiste, de travailler avec d’anciens commandos de marine des forces spéciales ?

Je passe de très bons moments à travailler avec les Navy SEAL dans cette start-up. J’ai toujours été ravi de voir comment PGP a été adopté, dans le monde entier, par les forces de l’ordre et de sécurité, et les services de renseignement, ceux-là même qui, initialement, voulaient pourtant me mettre en prison : on a gagné, la preuve ! Silent Circle suscite beaucoup d’intérêt de la part d’organisations militaires, services secrets, l’OTAN, le département d’État américain, qui veulent utiliser notre technologie, et protéger leurs appels téléphoniques avec nos technologies. Et c’est très satisfaisant de voir qu’ils s’en serviront probablement encore plus que PGP parce que mes partenaires sont d’anciens militaires, et qu’ils m’aident à pénétrer ces marchés.

Au début, les agences gouvernementales exprimaient des réticences à utiliser PGP, à cause de l’investigation criminelle dont j’avais fait l’objet, et du côté anti-establishment qui lui avait donc été associé. Quand le FBI est venu toquer à notre bureau, je me suis dit : “Oh non, c’est reparti !”, mais non, ils venaient nous voir parce qu’ils voulaient s’en servir ! Et ça, c’est très satisfaisant, je n’y serais jamais parvenu tout seul. En travaillant avec ces anciens commandos de marine, je parviens à toucher des clients que je n’aurais jamais pu toucher tout seul. Et cela va également rendre beaucoup plus difficile aux gouvernements de tenter de nous empêcher de protéger les communications de nos clients, puisqu’ils s’en servent ! Il y aurait trop de dommages collatéraux.

Le prochain champ de bataille de la cryptographie est la téléphonie.

Historiquement, les interceptions légales des télécommunications ont été utilisées par les forces de l’ordre pour résoudre des crimes, et elles en sont devenues dépendantes. Mais si vous regardez le nombre de crimes résolus au regard du nombre d’écoutes téléphoniques, ça ne représente qu’un pourcentage infime. La majeure partie des crimes sont résolus par d’autres modes d’enquête. Les crimes laissent des traces dans le monde physique.

Rendre les écoutes téléphoniques plus difficiles n’aura pas beaucoup d’impact dans la lutte contre la criminalité. Les choses changent, avec la migration de la téléphonie du réseau analogique vers l’Internet, parce qu’il devient possible, pour le crime organisé, d’espionner tout un chacun. Mais les dommages collatéraux qu’entraîneront l’impossibilité de mettre des individus sur écoute seront bien moins dommageables que la possibilité offerte au crime organisé de mettre tout le monde sur écoute.

Google avait installé une porte dérobée, et les Chinois s’en sont servis pour espionner des activistes ! Si vous installez une porte dérobée dans un logiciel, elle sera utilisée par les “bad guys“. Et puis je suis aussi contre les portes dérobées parce qu’elles vont à l’encontre de nos libertés ! Et tous ceux qui travaillent dans cette entreprise le font parce qu’ils partagent eux aussi ce à quoi je crois. Mike Janke, mon partenaire, a les mêmes opinions que moi en matière de vie privée et de libertés. Il a vu le pouvoir des services de renseignement, et il en a peur : il n’a pas envie de voir nos libertés mises à mal parce qu’elles seraient capables d’espionner leurs concitoyens. Et il est d’accord avec moi.


Portrait de Philip Zimmermann par Matt Crypto via Wikimedia Commons [CC-by-sa] . Illustration de Une par Alvaro Tapia Hidalgo [CC-byncnd]

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L’Inde (dé)connectée http://owni.fr/2012/10/19/inde-deconnectee/ http://owni.fr/2012/10/19/inde-deconnectee/#comments Fri, 19 Oct 2012 15:50:53 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=122952

Au départ, ce papier devait parler de train en Inde. Plus précisément, de l’initiative de la compagnie ferroviaire nationale indienne de publier une carte de temps réel du mouvement des trains à travers le sous-continent sous forme de Google Maps. Le tout agrémenté d’une évaluation en temps réel de la ponctualité sur le réseau.

Mais la question est vite venue au sein du Pôle “data” de savoir : à qui profite la carte ? Bien que dépouillée, l’application demande tout de même le chargement de Google Maps et des mises à jour en temps réel, sans compter les fenêtres d’info qui se déploient à chaque locomotive cliquée.

Portrait schizophrénique

Si l’Inde jouit sous nos climats d’une image de pays en plein boom technologique, les statistiques publiques reflètent une autre image. Par exemple, Les comptes de la Banque mondiale indiquent pour 2011 que 10,1% seulement des Indiens étaient des usagers d’Internet, contre 38,4% en Chine.

Data from World Bank

Le portail de la statistique publique indienne (Mospi) offre un aperçu bien plus fin de l’accès au web dans le pays. Une étude sur la consommation des Indiens portant sur les années 2009-2010 peint un portrait schizophrénique de ce pays : une face rutilante et équipée d’urbains et une majorité diffuse et déconnectée de ruraux.

Le recensement 2011 souligne l’importance de cette partition : à côté des zones fortement urbanisées comme Delhi (97,5% de ville), Chandigharh (97,25%) ou Lakshadweep (78,8%), la majeure partie de la population vit à la campagne. Avec 68,84% de ruraux, la dernière enquête répertoriait plus de 833 millions d’habitants hors les villes, coupés, pour la plupart, des infrastructures de communication modernes. Plus que la population totale de l’Europe – états hors Union européenne et Russie compris.

En croisant les deux données, nous avons cartographié la fracture numérique indienne (voir ci-dessous) : en rouge les états dont le taux d’accès en zone rurale est inférieur à dix pour mille foyer (soit inférieur à 1%), en jaune ceux dont l’accès est supérieur à 1% mais inférieur à 5% et en vert ceux dont l’accès est supérieur à 5% de la population. Sur les 35 états et districts de la fédération indienne, seuls six dépassent la zone rouge, pour une population totale de 44,5 millions d’Indiens. Les 29 autres comptent pour 1,165 milliards d’habitants. La moyenne nationale d’accès en zone rurale s’établissant pour 2009-2010 à 0,35% des foyers.

Prisme mobile déformant

Le potentiel commercial de ce milliard et quelques habitants pousse cependant de nombreuses sociétés à ignorer ce fossé numérique. L’une des méthodes utilisées consiste notamment à se concentrer non pas sur l’accès domestique mais sur l’accès mobile.

Une étude Ipsos commandée par Google et la Mobile Marketing Association assurait ainsi que les Indiens dépassaient les Américains dans l’Internet mobile. Le chiffre avancé de 76% d’usagers mobiles indiens utilisant les réseaux sociaux contre 56% des Américains ne portait cependant que sur les détenteurs de téléphone mobile.

Une première réserve porte sur le fait que l’accès fixe à l’Internet (comme le montre notre carte ci-dessus) reste marginale en Inde. L’étude consommation des ménages de l’institut de la statistique publique indienne relève néanmoins une consommation mobile très développée en zone rurale : l’achat de téléphone mobile concernait 69 foyers sur 1000 contre 1 sur 1000 pour les téléphones fixes et les recharges de mobile plus de la moitié des foyers interrogés (536 pour 1000) ! À titre de comparaison, l’achat de mobile concernait en zone urbaine 78 foyers pour 1000, soit moins de 1% de plus qu’à la campagne, et celle de recharges 818.

Une nuance de taille intervient cependant dans ces statistiques : celle de la dépense. En campagne, les dépenses mensuelles liées aux téléphones mobiles sont évaluées à 1,8 roupie par mois (1,4 centime d’euro) et 18,93 roupies (25 centimes) de recharge contre 55,58 roupies en ville pour les recharges (78 centimes) et 3,94 roupies en appareil (4,3 centimes).

Le site GeneratedContent.org se penchait récemment sur la façon dont la majeure partie du monde reçoit l’Internet mobile. Une étude datant de 2011 plaçait en tête des téléphones mobiles les plus utilisés dans le monde le Nokia 3150 Xpress Music, modeste dalle commercialisée depuis février 2009 par le constructeur finlandais. Avec ses 320 pixels de hauteur et 240 pixels de largeur connectés en WAP 2.0, cette antiquité aussi tactile qu’un Minitel reste à ce jour le téléphone le plus courant dans la plupart des pays d’Afrique (notamment en Egypte et en Afrique du Sud) ainsi qu’en Thaïlande et en Chine.

N’en déplaise à la ronflante étude Ipsos, l’Inde ne turbine pas la 3G à coup de Samsung Galaxy ou d’iPhone. Le téléphone le plus courant y est le Nokia X2 01 (également leader en Indonésie) dont les caractéristiques s’avèrent un peu meilleures que celle du 3150. Equipé en 3G (mais pas en Wi-Fi), le téléphone affiche sur un écran 320×240 pixels une densité de 167 pixels par image en QVGA pour une diagonale de 2,4 pouces. A titre de comparaison, l’iPhone 5 affiche en 4 pouces 1136×640 pixels.

Un commentaire au billet mentionné ci-dessus évoque une situation où la vision eurocentrée de l’accès à Internet a joué des tours aux meilleures volontés :

Il y a trois mois, j’ai déménagé en Afrique du Sud pour développer une application de réponse d’urgence. Dans un premier temps, j’ai pensé développer une application pour Android mais après quelques mois, j’ai réalisé que personne ne pouvait se payer ces téléphones. J’ai vite pris conscience de la popularité des Nokia et j’ai orienté mon application pour qu’elle soit compatible avec le X2-01.

Une réflexion valable pour les humanitaires comme pour les pouvoirs publics. Dans des pays dont l’accès mobile se résume à un écran de 2,4 pouces en 320×240, toute initiative d’Open Data inaccessible en Edge est vouée à rester un gadget dont ne se réjouiront que les pays où les appareils d’Apple et Samsung sont abordables jusque dans les zones rurales.

Le seul soulagement des pays mal équipés étant de fabriquer les téléphones mobiles haut de gamme à bas prix.


Photo par CGIARClimate [CC-byncsa]

La carte reprend les icones Rural designée par Evan Caughey et City designée par Inna Belenky, tous deux repérés en CC BY NC sur l’excellent site The Noun Project, recommandé par notre cher Cédric Audinot /-)


Nos données

Inde : accès à Internet des populations rurales et urbaines (Google Docs)

Sur le site officiel du ministère de la statistique du gouvernement fédéral indien (Mospi), les données sur les biens de consommation (dont les téléphones mobiles) sont à retrouver dans l’étude “Indicateurs clefs des dépenses des ménages indiens 2009-2010″ (PDF), publiée en juillet 2011 par le National Sample Survey Office du ministère Indien de la statistique.

Les données sur la connexion à Internet sont compilées dans l’étude “Niveau et schéma de consommation 2009-2010″ (PDF), publiée par le même organisme en décembre 2011.

Les données du recensement 2011 de l’Etat fédéral indien sont à télécharger en PDF ou en XLS sur le site dédié (interface Flash).

Les données de la Banque mondiale sur l’accès à Internet dans le monde sont à télécharger en XLS ou en XML sur l’excellent portail data de cette institution.

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http://owni.fr/2012/10/19/inde-deconnectee/feed/ 4
La semaine où les musées se sont fait hacker http://owni.fr/2012/10/19/la-semaine-ou-les-musees-se-sont-fait-hacker/ http://owni.fr/2012/10/19/la-semaine-ou-les-musees-se-sont-fait-hacker/#comments Fri, 19 Oct 2012 09:11:09 +0000 Geoffrey Dorne http://owni.fr/?p=123243 Responsive Museum Week : hacker et remixer les sites Internet existant des musées. C'est le projet dingue, séduisant et d'intérêt public que notre maître ès-graphisme Geoffrey Dorne vous raconte aujourd'hui par le menu. Bon appétit !]]>

Aujourd’hui, c’est un témoignage que je souhaite vous proposer. J’ai lancé cette semaine avec mon ami le créateur de communautés Julien Dorra, la “Responsive Museum Week” Le projet est simple : une semaine pour “hacker” et “remixer” les sites Internet existant des musées !

Aux origines…

Il y a quelque temps, j’ai écrit un article qui a suscité quelques émois et créé des questions/réponses passionnantes à propos du tout nouveau site internet du Centre Pompidou Virtuel, un des plus importants musées français. À côté de cela, mon ami Julien Dorra, se posait la question sur Twitter du “responsive web design” (l’adaptatibilité d’un site Internet à un téléphone mobile, à une tablette, etc.) au sujet de ce même musée.

Deux e-mails plus tard nous étions tous les deux d’accord pour affirmer que bon nombre de sites Internet de musées n’étaient absolument pas utilisables sur téléphone mobile et sur tablette et qu’il fallait faire quelque chose ! En effet, en situation de mobilité et dans n’importe quel musée, les visiteurs se servent de leur téléphone pour prendre des photos des oeuvres (même quand cela n’est pas autorisé), pour tweeter, facebooker, mais également pour se rendre sur le site du musée en question afin de retrouver des informations, des références, etc.

Réfléchir et prendre la parole sont une première étape, faire, créer, agir est l’étape suivante.

Trois jours “quick and dirty” pour créer le projet

Ainsi, nous avons imaginé une semaine créative où chacun maîtrisant un peu le code CSS pourrait “hacker”, “bidouiller”, “remixer” le site de son musée préféré afin de le rendre adapté au support mobile, téléphone, tablette, etc. Chaque musée et chaque internaute se verrait alors offrir en ligne et librement cette nouvelle version ergonomique, élégante, lisible et enfin adapté à ces supports actuels. Nous serons d’accord pour dire que cela ne suffit pas, que l’idéal serait de revoir intégralement l’expérience muséale en ligne, son contenu, sa forme, etc.

Mais… commençons déjà par cette toute petite chose qui est de rendre accessible et lisible nos chers sites web de musée sur un simple téléphone ou tablette, dans la rue, au musée.


Extrait du travail réalisé en collaboration avec Julien Dorra

La Responsive Museum Week est lancée

À la sortie c’est un concept, un challenge, un site internet adapté aux supports mobiles, des partenaires que l’on présente à la communauté des musées, des développeurs, des designers et à tous les curieux.

La mission est simple :

• Choisir le site internet d’un musée
• Modifier sa feuille de styles avec le plugin Stylish ou avec Firebug
• Capturez votre travail et partagez-le !
• Chacun pourra ainsi profiter de ce hack et tester le site s’il avait été adapté pour mobile

Les réactions

Les réactions ne se sont pas faites attendre, on ne touche pas aux musées comme ça. Si l’événement “Museomix” qui a lieu en ce moment à Lyon propose de “remixer” le musée sur place pour réinventer des formes de narration muséale, l’événement “Responsive Museum” propose, lui, de “remixer” les sites Internet des musées pour les rendre mobiles. On ne recréé pas l’intégralité du site Internet comme on ne recréé pas le musée, on s’y insère pour l’améliorer, le hacker de l’intérieur.

Sur Twitter, en revanche, l’appel à la créativité aura été bien reçu.

Une démarche créative et réactive

Ce mode de travail créatif, actif et collaboratif repose sur plusieurs points :

L’observation

En tant que designer, je passe mon temps à observer les usages, les gens, les habitudes, les détournements, les réactions et  de ces observations naissent des “insights”, des éléments intéressants que l’on capture pour venir ensuite créer des ouvertures créatives pour des projets. Ici, ça a été la sortie du site Internet du Centre Pompidou, son positionnement graphique, ergonomique et son accueil auprès du public.

La réactivité

Avec Twitter, quelques e-mails et un Google Document collaboratif, Julien Dorra et moi avons dressé les grandes lignes du projet et nous nous sommes répartis les tâches. J’ai réalisé le design de l’événement et le site Internet (adapté aux tablettes et aux mobiles), Julien a activé sa communauté, rédigé les textes et contacté différents acteurs de la programmation et des musées, notamment.

La collaboration créative

Trois jours après, ce sont déjà cinq musées qui se sont fait “hacker” par cinq bidouilleurs de code et de design. Chacun a pu également aider son camarade de hack et obtenir ainsi de nouvelles compétences. La collaboration créative est, à mon sens, une démarche qui peut être très puissante en termes de résultats, de productivité, d’imagination.

Du web design, orienté pour l’utilisateur mobile

Ci-dessous, voici les premières réalisations des participants. J’ai été très surpris de voir la réactivité et la qualité de ces modifications. En effet, adapter un site Internet au support mobile est une question complexe qui couvre d’une part, l’ergonomie, le design, la lisibilité, le confort de navigation et d’autre part, la programmation orientée mobile. Ici, l’exercice est encore plus périlleux car il est impossible de modifier totalement le code source du site.

À noter que chacun a publié son “hack” sur “Stylish“, un outil qui se rajoute à votre navigateur afin de modifier le site en temps réel lorsque vous y accédez. Tous les “hacks” sont accessibles sur ce tumblr.

Conclusion

Pour conclure ce “Vendredi c’est Graphism”, j’attire surtout votre attention sur la démarche créative que j’ai souhaité mettre en place avec Julien Dorra. Le fait de se réapproprier et de détourner quelque chose, en l’occurrence les musées, provoque la créativité. De plus, proposer un projet focalisé sur un élément très précis (ici, adapter le site Internet aux supports mobiles), ouvre la discussion sur des choses beaucoup plus larges comme la place du musée sur Internet, comme l’expérience muséale en ligne, etc. L’inverse aurait moins créé de débat. Enfin, “hacker” un site, un produit, une démarche, pour l’améliorer en totale autonomie (comme lorsque j’ai sorti Sublyn sans contacter la RATP) permet d’aller au bout des choses sans considérations stratégiques, politiques, décisionnelles, etc. et donc de se concentrer sur une seule voix, celle du design centré utilisateur.

Des enseignements et une approche “design / hacking” que je réitérerai très certainement sur d’autres projets à l’avenir :)

Excellent week-end à toutes et à tous et… à la semaine prochaine !

Geoffrey

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Des mobiles et des hommes http://owni.fr/2012/06/28/free-guerre-au-mobile/ http://owni.fr/2012/06/28/free-guerre-au-mobile/#comments Thu, 28 Jun 2012 19:14:46 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=114129 Owni vous raconte les dessous et les batailles de ce conflit sans merci, duquel il est dit que Bouygues Telecom s’apprêterait à annoncer un plan social dès juillet.]]>

C’est une partie qui démarre sur les chapeaux de roues. Avant de sérieusement se corser. Récit de la quête du Saint-Mobile, dans l’impitoyable contrée des Télécoms, en un texte… et une infographie (voir en bas d’article), par Loguy.

L’Iliad et l’Odyssée

Le 10 janvier 2012, Xavier Niel, président d’Iliad et co-fondateur de Free, s’avance sur une estrade installée dans son QG, près du métro Madeleine à Paris. Casque-micro vissé sur la caboche, dégaine à la fois offensive et fébrile. Il ne lance pas Free Mobile : il le propulse tel un missile dans le monde des télécoms. Et au-delà.

Free frime

Free frime

Un Xavier Niel au bord des larmes, une communauté surexcitée sur Twitter et une couverture médiatique unanime. C’est le ...

“Rocket is on the launch pad”. Le mystérieux message, signe du lancement imminent du quatrième opérateur mobile français, circulait depuis quelques jours sur Internet et annonçait déjà la couleur. Chauffant à blanc l’attente de toute une communauté, les “freenautes”, déjà lancée dans un jeu de piste effréné, consistant à trouver les détails des futurs forfaits de Free Mobile. Énigme savamment orchestrée par l’opérateur : pas d’affiches ni de spots, juste quelques indices disséminés sous forme de lignes de code sur Internet. Miser sur le silence et la rareté pour faire monter la sauce. Jusqu’à l’explosion : la présentation des deux forfaits. L’“illimité” à 19,99 euros, le “social” à 2 : une rupture avec les pratiques du secteur.

Niel s’enflamme : Free Mobile est une affaire de transparence, de justice, de probité. “On vient pas là pour gagner de l’argent on vient là pour foutre le bordel.” Un marketing de robin des bois, de chevalier blanc, qui n’est pas sans rappeler une certaine marque à la pomme. Et qui marche. Vivas dans la salle et couverture médiatique euphorique. Free explose les highscores : carton d’audience pour les sites de presse en ligne, mais aussi affluence record sur la plate-forme commerciale de l’opérateur. Xavier Niel évoque le chiffre de 3 à 4 millions de demandes d’information. Le site tombe dans la journée. La machine à gagner Free Mobile est en surchauffe : c’est le début des bugs.

Fight !

Dès le surlendemain, l’organisme en charge du transfert des numéros des clients souhaitant changer d’opérateur (“le GIE portabilité”), annonce le triplement des demandes. Free, qui s’était engagé à livrer les cartes SIM sous 24 heures, ne peut tenir ses promesses. Embouteillage dans le traitement des dossiers, mini pépins techniques… les soucis s’accumulent et le ton change dans la presse, qui se fait le porte-voix des clients mécontents. Sous les articles, néo-Freenautes désabusés et Free-fans convaincus s’affrontent à coup de commentaires. De son côté, Xavier Niel met en cause la portabilité des numéros, accusant le GIE de mal faire son travail. Et crie au complot à mots à peine voilés :

Tous les moyens sont bons pour discréditer le petit nouveau […] mais nous sommes peut-être parano chez Free…

Free Mobile crie au complot

Free Mobile crie au complot

Free Mobile : mytho, parano ou réglo ? Xavier Niel semble débordé par le buzz qu'il a lui-même provoqué avec son offre ...

Il faut dire que la bataille commence à faire rage du côté des concurrents. Parallèlement aux couacs commerciaux, Free Mobile connaîtrait des dysfonctionnements techniques. Pire, son réseau ne serait conformes aux obligations que l’opérateur est censé remplir. Soit une couverture effective de 27% de la population française. Free, hors des clous ? La question enfle dans les médias. Les témoignages à charge “d’ingénieur des télécoms” pleuvent. Sans qu’il soit possible de démêler l’info de l’intox, la défaillance de l’enfumage. Expertises, contre-expertises, constats d’huissiers : le pouls des télécoms français bat au rythme de Free mobile. Complot ou non, le pari est d’ores et déjà gagné pour le petit dernier du secteur : mieux vaut la désinformation à l’indifférence.

Une confrontation sanglante dans laquelle Xavier Niel a été le premier à sonner la charge. Non content de briser leur rente de situation, il s’est moqué de ses concurrents, rappelant la condamnation d’Orange, Bouygues et SFR en 2005 pour entente, et mettant en doute leur virginité nouvellement acquise. Et prononçant cette phrase devenue célèbre :

Si vous ne passez pas chez Free Mobile, vous êtes des pigeons !

Une agressivité qui n’aurait donné suite à aucun procès. Et dont Xavier Niel serait revenu. A en croire une récente interview à Challenges, le patron de Free aurait raccroché les gants… ou presque, taclant encore les pratiques “inavouables” de ses camarades.

Player 1 : Orange, opérateur à papa

Seul épargné du pugilat, Orange. L’opérateur à papa, comme aime à le désigner Xavier Niel, a finalement été peu accroché dans la bataille. Parce qu’on ne tape pas sur celui qui, bon gré mal gré, vous soutient.

L’actuel patron d’Orange, Stéphane Richard, s’est lui-même montré bienveillant envers Free et son ambition de décrocher la quatrième licence mobile. C’était dans une autre vie, alors qu’il était directeur de cabinet de la ministre de l’Économie Christine Lagarde. Ce qui lui a tout de même valu quelques remerciements chaleureux de la part de Xavier Niel.

Sans compter qu’en concluant un accord d’itinérance avec Free, Orange a mis à sa disposition une infrastructure solide, sur laquelle le quatrième opérateur a pu s’appuyer pour parer à ses défaillances.

L’Arcep et Besson se disputent sur Free

L’Arcep et Besson se disputent sur Free

Free Mobile est officiellement le trublion du secteur des telecom. A tel point que l'autorité de régulation et le ...

Peut-être un peu trop : constatant qu’une grande partie du trafic de Free circulait par ses antennes, et redoutant que les pannes touchant ce dernier ne l’affecte aussi, Orange a fait les gros yeux, menaçant de rompre l’accord. L’affaire semble aujourd’hui apaisée, avec une réévaluation à la hausse des gains qu’Orange est susceptible de tirer de cette affaire. D’abord estimés aux alentours de 1 milliard, ils pourraient rapporter plus du double. Juteux pour l’opérateur historique, qui se défend de vouloir aider Free : “c’est la meilleure protection pour l’entreprise, ses salariés, ses actionnaires, que je pouvais trouver face à l’arrivée du quatrième opérateur”, explique Stéphane Richard.

Il n’empêche. Arroseur arrosé, les soupçons d’entente entre Orange et Free gonflent. Et Xavier Niel n’arrange rien, en présentant les deux opérateurs comme les plus “légitimes” du secteur. Orange comme historique un peu chicos, Free comme petit dernier provocateur. De quoi provoquer la colère de SFR, Bouygues et des autres joueurs de la partie télécom. Ils dégainent les coups spéciaux. Selon Le Parisien, une plainte serait déposée auprès de la Brigade financière. Et SFR réfléchirait à une action auprès de Bruxelles.

Arcep vs Besson

Face aux critiques visant son réseau, Free n’a pas non plus hésité à brandir la carte justice. “A compter de ce jour, Free Mobile attaquera en justice toute personne dénigrant la réalité de sa couverture (réseau) ou de ses investissements” tonne l’opérateur dans un communiqué en date de mars 2012. Une menace qui aurait selon lui eu son petit effet : aujourd’hui, la polémique sur la couverture de Free Mobile semble s’être dégonflée comme un soufflé mal cuit. Mais dans l’intervalle, elle a secoué les plus hautes instances de la République. Ravivant de vieilles querelles qu’on croyait éteintes.

En l’occurrence, entre le ministère de l’Industrie et l’Arcep, le gendarme des télécoms, qui a encadré l’introduction de Free Mobile sur le marché. Ou plus précisément, entre le cabinet d’Éric Besson et l’Arcep, alors en froid depuis un an. Le premier tapant sur le second, en lui reprochant d’avoir mal vérifié le réseau et en le sommant de recommencer. Le second s’en défendant, fustigeant les pratiques de certains opérateurs. Le tout nappé d’une crise d’autorité, dans laquelle chacun tente de publiquement prouver qu’il a la main sur le dossier. En résulte une guerre de communiqués, des accusations de courrier anti-daté et des réponses par voie de presse interposée.

Free Mobile couvert

Free Mobile couvert

Oui, Free Mobile couvre bien 27% de la population. Et c'est le gendarme des télécoms qui le dit, tentant ainsi de mettre un ...

Fin janvier, le régulateur des télécoms décide néanmoins de vérifier une seconde fois le réseau de Free. Pour le valider à nouveau, un mois plus tard.

En marge de l’Arcep, l’Industrie somme l’Anfr (Agence nationale des fréquences), instance directement placée sous ses ordres, de procéder également à une vérification de la couverture du quatrième opérateur. Là encore, le constat va dans le même sens, l’agence estimant que Free peut couvrir 30,8 % de la population métropolitaine [PDF].

Try again : level Emploi

Besson parti, l’histoire des réseaux en grande partie derrière eux, les télécoms n’en ont pourtant pas fini avec Free Mobile. Une nouvelle bataille s’intensifie. Cette fois-ci, pas question d’antennes, de cartes SIM ou d’entente, mais d’emplois. D’une vague de licenciements dans le secteur mobile dont Free, et sa prestation que la concurrence qualifie de “low-cost”, seraient seuls responsables.

Et s’ils ont chiffré l’hémorragie de leur clientèle, Orange, Bouygues et SFR sont autrement plus réticents à parler d’éventuelles saignées dans leurs rangs. Stéphane Richard l’a d’ailleurs assuré au micro de BFM : pas de plan social en perspective. Pourtant, les chiffres pleuvent : le président de l’Arcep Jean-Ludovic Silicani avance un chiffre de 10 000 pertes, le syndicat Force ouvrière table lui sur 30 000 disparitions de postes en France. Une récente étude a fait état de plus de 70 000 destruction d’emplois. Il y a quelques années, Orange, SFR et Bouygues eux-mêmes, n’hésitaient pas à agiter le chiffon rouge des licenciements massifs pour dissuader les autorités de donner une quatrième licence mobile. Intox ou réelle menace ?

Affaiblis dans cette guerre du mobile, les opérateurs historiques disposent peut-être d’une carte Joker sur le volet de l’emploi : Arnaud Montebourg. Dans une interview à Challenges, le ministre du redressement productif fraîchement installé s’est fendu d’une sortie contre l’Arcep. Et, en creux, contre Free Mobile, estime de nombreux observateurs. Déclarant notamment :

Pour le gouvernement, la concurrence doit trouver sa limite dans la préservation de l’emploi.

Aujourd’hui à Bercy, l’intérêt du secteur prime sur celui des consommateurs et Montebourg le fait savoir. Ouvrant une brèche dans laquelle s’engagent -sans surprise- opérateurs (Thierry Breton et Stéphane Richard, respectivement ancien et actuel patrons de France Telecom) et ayants-droits, par la voix de Pascal Rogard, pour qui forfaits à bas prix riment avec pillage des œuvres sur Internet. En face, l’intéressé a déjà riposté dans Les Échos, lançant que les pertes d’emplois s’étaient amorcées avant Free Mobile…

Les troupes se reforment donc et fourbissent leurs armes. La saga est loin d’être terminée. Et risque d’être sérieusement relancée dès juillet, quand Bouygues Telecom devrait selon nos informations annoncer un plan social touchant plusieurs milliers d’employés. Contacté par OWNI, l’opérateur ne souhaite pas faire de commentaires. N’infirmant, ni ne confirmant. Le jeu vient de se relancer. “Other players are ready to play”.

Baladez votre souris et découvrez dans les cercles gris les liens qui font l’histoire de la guerre aux mobiles !



Full disclosure : Xavier Niel est actionnaire, à titre personnel, de la SAS 22Mars, maison mère d’OWNI (à hauteur de 6%). Suite à la scission de 22Mars et OWNI, j’ignore ce qu’il advient de son investissement. Mais comme le dit justement Manhack, OSEF.


Illustrations par Loguy (CC)

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http://owni.fr/2012/06/28/free-guerre-au-mobile/feed/ 0
Les data en forme http://owni.fr/2012/03/05/les-data-en-forme-episode-23/ http://owni.fr/2012/03/05/les-data-en-forme-episode-23/#comments Mon, 05 Mar 2012 11:36:45 +0000 Paule d'Atha http://owni.fr/?p=100667 OWNI vous embarque dans un projet de démocratie ouverte et dans de jolis univers graphiques issus de l'Open Data. Le monde de la donnée peut être beau, et vous pouvez être beau ou belle à l'intérieur de ce monde-là.]]>

Le Centre de pédagogie urbaine (CUP) est une organisation à but non-lucratif qui tente d’améliorer l’engagement citoyen au moyen de l’art et du design. Ses projets “démystifient les politiques urbaines et les problèmes d’organisation qui ont un impact sur nos quartiers, pour que davantage d’individus puissent participer à leur modélisation”. Le projet “Envisioning Development: What is Affordable Housing?” [en] apporte un souffle de vitalité passionnant dans le monde en mouvements qui est le nôtre, et qui tourbillonne chaque jour davantage sous les frétillements de la masse curieuse devant l’inévitable. Le monde change, les citoyens s’emparent des sujets centraux de la société. C’est nouveau, et ça va tout changer.

L’idée de “affordable housing” (logement abordable) peut paraître banale, comme l’indique le site, sauf qu’il revêt souvent de nombreuses significations selon la position que vous vous attribuez sur l’échelle sociale. Le CUP a donc réalisé un atelier interactif en kit permettant de comprendre pourquoi la seule question vraiment importante à se poser au moment de bâtir des logements est : “abordable pour qui ?”. Un kit qui encourage donc le citoyen à devenir le porte-voix de la raison par la data afin d’évangéliser d’autres citoyens ainsi que les élus. Sans aucun doute la première graine new-yorkaise d’une longue série d’initiatives populaires qui viendront essaimer nos contrées au gré du vent printanier.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La data è mobile

Plus près de chez nous, l’un des joyaux culturel européen a rouvert cette semaine son portail Open Data : Florence [it]. Après un lancement discret en octobre dernier, la cité toscane se relance modestement en ajoutant à son patrimoine 180 petits jeux de données en licence CC-BY, et en enrichissant son offre d’une section de geodata permettant la création aisée de cartes, ainsi qu’en commençant à publier tout le bazar en Linked Open Data, autant dire que ça rigole pas.

En tout cas, les Florentins devraient permettre à l’Italie de remonter au classement PSI [en] élaboré par la plate-forme européenne du même nom, PSI signifiant “Public sector information”. Ce classement, toujours en version beta, est “un outil pour mesurer le niveau de l’Open Data et de la réutilisation des données publiques à travers l’Europe”. Le principe est amusant, sans grande prétention, et possède deux atouts à nos yeux : tout d’abord, c’est un projet entièrement fondé sur le principe du crowdsourcing, c’est-à-dire que l’EPSI compte sur les spécialistes de l’Open Data locaux pour remonter les initiatives de chaque pays ; en échange de quoi, l’ensemble des données récoltées seront reversées à la communauté lorsque le classement sortira de sa phase beta – ce qui serait imminent. Deuxième initiative plaisante : l’utilisation de la toute jeune plate-forme de création de visualisation de données infogr.am. Et ça, c’est vraiment bon esprit.

Tête dans le flux

L’Open Data et l’Open Gov, on sait évidemment en faire en France. (Tiens, petite bulle hors du temps, la lecture d’un récent billet du jeune patron des Données Ouvertes tricolores cause démocratie et transparence, gardons-le sous le coude.) La Poste, elle aussi, aime ça. Elle aurait tort de se priver : avec son incomparable maillage, avec les flux continus de matière qu’elle transmet quotidiennement au cœur de la société, avec l’époustouflant réseau qui tisse et relaie l’information en permanence, elle possède une sacrée matière à exploiter. C’est d’ailleurs ce qu’elle a fait en s’associant avec le laboratoire FaberNovel : en se basant sur “le fichier anonymisé des changements d’adresse de La Poste”, elle a démontré sa dextérité dans le maniement de la visualisation dynamique en mettant en scène de manière fort esthétique “les mouvements des familles depuis et vers les Bouches-du-Rhône” en 2009. En vert c’est d’où ça vient, en rouge c’est où ça va. Le projet “Flux2” est tout simplement beau à regarder.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Puisque nous en sommes aux (télé-)communications, on pourra aussi jeter un oeil cette semaine à l’intéressante initiative Sensor.ly, qui “aide les opérateurs mobiles à améliorer la qualité de leurs réseaux” grâce à une communauté de testeurs enregistrant quotidiennement “la présence de couverture et la puissance du signal radio reçu par leur terminal”. On aura compris que le projet, qui veut offrir au grand public un moyen simple de comparer la couverture des opérateurs mobile à travers le pays, aura donc besoin d’étoffer ladite communauté de testeurs s’il veut gagner en ampleur et en crédibilité. En tout état de cause, l’idée est bonne, et nous avons hâte de voir comment elle évoluera, et de quelle manière les opérateurs – qui n’ont pas toujours énormément d’humour lorsqu’il s’agit de mettre le doigt publiquement sur la qualité de leur service – s’empareront de ce sujet qui concerne la majeure partie de la population.

Datalife

Et puisqu’on en est à parler mobile et qu’on a toujours un immense plaisir à faire tourner les jolies data, un hommage à la Suisse et au projet “Ville Vivante” qui (re)trace de manière enthousiasmante la circulation permanente des téléphones au sein de la ville de Genève. Ce n’est pas la première fois que nous partageons notre admiration pour cette façon originale, comme gavée aux particules élémentaires, de fabriquer des cartes (é)mouvantes pour représenter la data. Celle-ci comme les autres semble unique, figée dans une géographie temporelle et féérique, abîmée dans l’irréel et l’abstraction d’un monde pourtant bien concret au travers des milliards de bits de données qu’il a fallu rassembler pour la produire.

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Un petit concerto de J.S. Bach et le talent de Stephen Malinowski pour vous souhaiter une magnifique semaine à tou(te)s !

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Retrouvez tous les épisodes des Data en forme !

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http://owni.fr/2012/03/05/les-data-en-forme-episode-23/feed/ 3
Free Mobile crie au complot http://owni.fr/2012/01/27/free-mobilise-par-sa-parano/ http://owni.fr/2012/01/27/free-mobilise-par-sa-parano/#comments Fri, 27 Jan 2012 11:28:04 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=95955

Xavier Niel en décembre 2011/LeWeb11

Que se passe-t-il chez Free mobile ? Ces derniers jours, la presse aligne les articles pointant l’un les dysfonctionnements techniques, l’autre les couacs d’une arrivée de clientèle massive et mal gérée. Laissant derrière elle l’euphorie (l’hystérie ?) des premiers jours du lancement de l’offre mobile de Free.

Du côté de l’opérateur, on crie au complot à mots à peine voilés. Auditionné mercredi matin à l’Assemblée nationale, le désormais iconique patron de Free Xavier Niel a attribué les difficultés rencontrées à la malveillance de ses “petits camarades” :

Tous les moyens sont bons pour discréditer le petit nouveau(…) mais nous sommes peut-être parano chez Free…

Le réseau du plus fort est toujours…

Pour ce qui est de son réseau, Free est formel : rien à signaler, il est irréprochable. “Allumé depuis le premier jour, il fonctionne de façon significative” a appuyé Xavier Niel devant les députés de la commission des affaires économiques. Unique concession : sur le millier d’antennes déclarées actives, seul le déploiement sur Paris laisse à désirer. La faute à la concurrence : “on pense que nos petits camarades bloquent le déploiement. Ailleurs, nous déployons sans grande difficulté”, a poursuivi le patron d’Iliad (maison-mère de Free).

L’opérateur est tenu d’assurer la couverture de 27% de la population avec son infrastructure, déployée en amont de son arrivée sur le marché mobile. Pour le reste, il a signé un accord d’itinérance avec Orange, d’un montant de 1 milliard d’euros, lui permettant de s’appuyer sur les antennes de l’opérateur historique. Problème : selon des observateurs cités chez nos confrères, le réseau de Free serait éteint. L’intégralité du trafic généré par les nouveaux clients Free mobile passerait sur l’infrastructure de France Telecom. Ce qui pourrait mettre en péril l’accord d’itinérance, valable uniquement si les 27% sont assurés. Et remettre en cause la capacité de Free à tenir le rôle tant attendu de quatrième opérateur.

Free frime

Free frime

Un Xavier Niel au bord des larmes, une communauté surexcitée sur Twitter et une couverture médiatique unanime. C’est le ...

Le Figaro, qui a dégainé le premier, écrit que l’information émane de “certains concurrents” de Free. Sans plus de précision. Même son de cloche ailleurs : on fait appel à des “ingénieurs”, des “sources internes” aux autres opérateurs. Pour Free, l’affaire est trop belle pour ne pas y voir une tentative de déstabilisation de la concurrence. Quant à cette dernière, elle oscille officiellement entre bouche cousue et déclarations ambiguës. Interrogés par OWNI, Bouygues Telecom et SFR n’ont pas souhaité faire de commentaires. Du côté d’Orange, son président Stéphane Richard explique qu’il existe une “grande confusion” sur l’état du réseau Free mobile, sans toutefois en dire davantage. Contre-attaque de l’ancien monde mobile pour certains, arnaque de Niel pour d’autres, l’incertitude pèse et pousse à disséquer le moindre élément présenté comme preuve de la déficience de Free mobile.

Seul fait établi : les opérateurs n’ont pour le moment rien mis en œuvre pour faire constater l’éventuelle défaillance. “Qu’ils poursuivent l’Arcep !” avait lancé Xavier Niel devant les députés, rappelant qu’en décembre dernier, le régulateur des télécoms avait validé la couverture de son réseau mobile, donnant ainsi son feu vert à l’arrivée des offres de Free sur le marché. “Sauf à considérer qu’elle n’est pas indépendante, l’autorité l’a constaté. [...] Elle produira un jour un très bel audit si on lui demande”, avait poursuivi le fondateur de Free. Du côté du régulateur, on confirme qu’aucune “réaction officielle” n’a été enregistrée : “nous n’avons été formellement saisi par aucun opérateur” a déclaré l’Arcep à OWNI.

Les syndicats CFE-CGC et UNSA des opérateurs mobiles se sont en revanche adressés à l’autorité, lui faisant part de leur “forte préoccupation relative au respect par FREE MOBILE de ses obligations réglementaires”. Ils demandent l’ouverture d’une enquête. Sans pour autant être soutenu par leur direction. “C’est surréaliste, regrette Sébastien Crozier, président de la CFE-CGC/UNSA de France Télécom-Orange, ils n’osent pas prendre position, ils ont peur d’être lynchés par l’opinion publique !”

Pas de portabilité dans les portables

“Dans le monde des télécoms, il y a beaucoup de coups bas”, estime Edouard Barreiro de l’UFC-Que Choisir. “Mais ça n’excuse pas tout.” En particulier quand les tentatives de sabotage des uns et des autres laissent l’utilisateur au bord de la route. Peu affecté par le drame qui se joue autour du réseau de Free mobile, ce dernier pâtit en revanche de la mise en service laborieuse des offres de l’opérateur. Le service après-vente serait injoignable, le délai d’attente des cartes SIM interminable. Et les nouveaux clients laissés en rade, leur numéro ayant été transféré de leur ancien opérateur vers Free mobile, avant même réception de la carte SIM (procédure de “portabilité” du numéro).

Devant les députés, Xavier Niel a plaidé des difficultés à l’allumage tout en minimisant. “Nous avons été débordé par les demandes” a-t-il expliqué, se déclarant victime du succès de Free mobile des tout premiers jours. La seule journée de lancement aurait généré 3 à 4 millions de demandes d’information, mettant ainsi hors service le site prévu à cet effet. Mais aujourd’hui, tout va bien. Ou plus exactement, la cause des autres dysfonctionnements est à chercher dans le camp d’en face.

FreeMobile : combien ça coûte ?

FreeMobile : combien ça coûte ?

Etrangement, FreeMobile ne propose pas de calculette permettant d'estimer les économies que l'on pourrait réaliser en ...

Pour les cartes SIM retardées, Xavier Niel pointe vers La Poste, sans la nommer : “certains courriers ont été perdus, sur des centaines de milliers, c’était inévitable” a-t-il répondu lors de son audition à l’Assemblée. Pour les problèmes de portabilité, c’est de la responsabilité du GIE-EGP, l’organisme qui regroupe une trentaine d’opérateurs mobile, entre lesquels il assure le transfert des numéros. Pour le fondateur de Free, ce groupement ne suivrait pas la montée en charge. “Le maximum de traitement de ce service est de 30.000 par jour et va monter à 40.000, a-t-il détaillé. Ils promettent 80.000 d’ici la fin de la semaine. Ca ne va pas très vite.”

Réponse agacée du berger à la bergère : Free n’avait qu’à mieux estimer ses besoins ! “Ils n’ont pas anticipé cette hausse de la demande et le fait qu’elle causerait un goulot d’étranglement”, rétorque le directeur opérationnel du GIE Nicolas Houéry. “On avait prévu une augmentation avec l’arrivée de Free mobile, mais on ne s’attendait pas à autant. Nous avions fait des estimations mais Free n’a pas réagi.” L’opérateur est membre du GIE depuis décembre 2010. Ensemble, ils avaient opéré des tests techniques “qui se sont bien passés”, poursuit le directeur opérationnel, qui assure faire le nécessaire pour ajouter du matériel visant à accélerer la portabilité.

Un joyeux bordel donc, dans lequel chacun se renvoie la balle dans un climat de suspicions et de mauvaise foi. Sur la portabilité toujours, Xavier Niel n’a d’ailleurs pas manqué de répéter sa complainte du soupçon, déclarant espérer que le GIE, et ses opérateurs de membres, “sont de bonne foi”. Ambiance.

Mésaventures

Dans cet embrouillamini, seul le retour des utilisateurs semble dessiner plus honnêtement les contours de la situation. Et force est de constater que de nombreux convertis Free mobile se plaignent des retards. Sur Twitter, Facebook ou les forums de Free (pour ne citer qu’eux), les commentaires pleuvent. Y compris de la part des Freenautes, cette communauté si proche de la marque de Xavier Niel. Un de nos lecteurs, se décrivant comme “un de ces passionnés qui on attendus Free mobile comme le ‘messie’” raconte ses mésaventures :

Inscription le 11/01 à 8h30 (passionné ! Galvanisé par cette conférence de presse !)
Envoi de la carte SIM le 13/01.
Portabilité effective le 16/01 et coupure de tout service.
Je n’ai jamais reçu de SIM.
Visiblement, il y a eu un bug dans l’adressage.
Le service client est joignable au bout d’une heure d’attente. La seule solution proposée est d’attendre…
Ils refusent de communique votre RIO [NDLR : l'identifiant permettant le transfert du numéro vers un autre opérateur] permettant de quitter Free mobile.
Suite à mes réclamation, une seconde SIM est envoyée le 20/01.
A ce jour, 25 janvier aucunes nouvelles.
Je suis en relation avec @freemobile. Je leur réclame mon RIO, il me demandent mes coordonées… Rien à faire, je me sent complétement coincé.
10 jours sans portable. Le pigeon, c’est moi !

Pour autant, la lune de miel semble encore durer. Chez Free, on nous dit être “serein”, expliquant que si les problèmes étaient aussi graves que présentés dans la presse, la colère de la communauté virerait en “émeute”. Du côté de l’association UFC-Que Choisir, on fait état de réclamations portant sur l’annulation de la portabilité, difficile à mettre en œuvre, ou sur des litiges sur les sept jours de rétractation obligatoires. “Ils ont merdé sur la gestion” lâche Edouard Barreiro. Sans toutefois parler d’émeutes.


Photo de Xavier Niel par LeWeb11/Flickr (CC-by)

Full disclosure : Xavier Niel est actionnaire, à titre personnel, de la SAS 22Mars, maison mère d’OWNI, mais, comme dirait @manhack, #OSEF.

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http://owni.fr/2012/01/27/free-mobilise-par-sa-parano/feed/ 22
FreeMobile : combien ça coûte ? http://owni.fr/2012/01/10/freemobile-combien-ca-coute/ http://owni.fr/2012/01/10/freemobile-combien-ca-coute/#comments Tue, 10 Jan 2012 18:39:24 +0000 Jean Marc Manach http://owni.fr/?p=93680 Le lancement des forfaits FreeMobile fait exploser les statistiques de fréquentation des sites d’information, qui multiplient les articles et donnent à cette couverture médiatique tous les atours d’une énorme campagne de promotion gratuite (voir Free frime).

MaJ : Désireux de savoir combien un abonné pourrait économiser (#oupas) en migrant dès aujourd’hui chez FreeMobile, OWNI a de son côté créé une petite calculette afin de pouvoir comparer ce qu’un abonné (soumis à une durée d’engagement de 12 ou 24 mois -et au-delà des services associés, ou de la question du renouvellement du mobile) paiera à son opérateur actuel, et ce que coûterait, frais de résiliation compris, de passer dès aujourd’hui chez FreeMobile.

MaJ bis : devant la pression populaire, en commentaire, nous rajoutons également le forfait à 2€ (ou à 0€ pour les abonnés Freebox) que nous n’avions pas initialement mentionné dans la calculette, conçue pour aider ceux qui voulaient opter pour le forfait à 15,99/19,99€ tout en étant engagé chez un autre opérateur, et parce que nous pensions bêtement qu’on n’avait pas besoin d’OWNI pour faire des multiplications par deux.

MaJ ter : malgré les nombreux commentaires accusant OWNI d’être vendu aux concurrents de Free, nous refusons d’évoquer dans la calculette ceux qui n’ont pas de durée d’engagement. Pourquoi ? Parce qu’ils n’ont pas besoin de calculette pour savoir combien FreeMobile leur fera économiser, encore faut-il apparemment le préciser : cette calculette ne sert qu’à estimer combien vous coûtera le fait de quitter votre opérateur actuel si vous êtes soumis à une durée d’engagement, tout simplement. Nous pensons que les gens sont suffisamment intelligents pour ne pas avoir besoin de nous pour savoir si, en fonction de leurs consommations et forfaits, l’offre de FreeMobile est plus intéressante pour eux, #oupas.

En vertu de la loi Châtel, trois cas de figures se présentent : si votre période d’engagement est de 12 mois, vous êtes tenus de payer la totalité des mois restants. Par contre, si la durée est de 24 mois, vous devez certes payer l’intégralité de la première année, mais seulement le quart des mensualités de la seconde année.

On découvre ainsi qu’un abonné qui se serait engagé pour 12 mois n’a donc a priori aucun intérêt économique à passer chez Free d’ici la fin de sa période d’engagement : il devra de toute façon payer à son opérateur l’intégralité des mois restants. De même, un abonné ayant souscrit un forfait de téléphonie mobile à 25€, et qui ne serait pas déjà client des forfaits Internet Free, paiera plus cher en souscrivant à l’offre FreeMobile qu’en restant chez son opérateur jusqu’à la fin de son engagement. Quand bien même il serait déjà abonné chez Free, il ne ferait d’économies que s’il lui reste moins de 14 mois d’engagement : au-delà, l’offre FreeMobile, frais de résiliation compris, lui reviendra plus cher.

Les titulaires d’abonnements à 30€ qui ne sont pas déjà abonnés à l’offre Internet de Free n’économiseraient eux aussi que 13€ s’il leur reste 5 mois d’engagement, 32€ pour un an. Par contre, s’il leur reste plus de 14 mois d’engagement (ou 17 s’ils sont déjà clients chez Free), la migration vers FreeMobile leur reviendrait plus cher que de rester chez leur opérateur actuel…

Diviser la facture par deux ?

A contrario, plus le montant du forfait est élevé, plus les économies à réaliser sont importantes, et encore plus si l’abonné est déjà chez Free. Le titulaire d’un abonnement à 56€ pourrait ainsi espérer économiser 110€ s’il lui reste 5 mois d’engagement, 266€ s’il lui reste un an, mais seulement 27€ s’il vient tout juste de s’abonner (et, respectivement 130, 313 et 123€ s’il est déjà client de Free).

Un comparatif réalisé en octobre dernier montrait que les offres “quadruple play” (internet + télévision + téléphonies fixe + mobile) revenaient, sur 24 mois, entre 1627€ (Numéricable) et 2758€ (Orange). En l’état, l’abonnement à l’offre “triple play” de Free plus l’abonnement à FreeMobile revient, lui, à 1248€ (ou 1128€ sans la téléphonie mobile illimitée depuis la FreeBox, ou 912€ avec le forfait à 2€).

La différence est certes importante, et si FreeMobile peut effectivement permettre de “diviser par deux la facture de téléphonie mobile“, comme Xavier Niel s’y était engagé, l’offre de Free ne permet donc pas forcément pour autant de diviser par deux la facture de ce que coûtent l’ensemble de nos télécommunications (MaJ 2 : sauf à opter pour le forfait “light” à 2€).

Les autres opérateurs étant susceptibles de revoir leurs offres pour répondre à FreeMobile, afin de faire baisser la facture, il n’est donc pas forcément urgent de se précipiter. “19,99 euros, c’est notre prix et l’on souhaite que nos concurrents viennent s’aligner sur le marché“, a déclaré ce matin Xavier Niel. La course est lancée. On attend avec impatience la concurrence…



MaJ : PS : plusieurs commentaires soulignent que notre calculette ne prend pas en compte le forfait à 2€, le coût de l’achat à crédit et/ou subventionné du mobile, des services associés, ou encore de ceux qui n’ont pas d’engagement. C’est tout à fait vrai : nous ne prétendons pas avoir réalisé la calculette ultime, mais un outil permettant de se faire une idée du prix de la téléphonie mobile, telle que Free vient de la redessiner, et pour ceux qui -la majorité- ont un forfait avec une durée d’engagement. Pour ce qui est des services associés (3Go de datas, sans filtrage de ports, notamment), on attend la réponse des autres opérateurs. Pour ce qui est de l’achat de mobiles, la question reste à creuser, les iPhone 4S coûtant apparemment plus cher acheté “à crédit” via FreeMobile que directement sur Apple…

Application “Calculette” développée par James Lafa et Anne-Lise Bouyer.

Full disclosure : Xavier Niel est actionnaire, à titre personnel, de la SAS 22Mars, maison mère d’OWNI, mais #OSEF.

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http://owni.fr/2012/01/10/freemobile-combien-ca-coute/feed/ 133
Free frime http://owni.fr/2012/01/10/free-mobile-xavier-niel-operateurs-telecoms/ http://owni.fr/2012/01/10/free-mobile-xavier-niel-operateurs-telecoms/#comments Tue, 10 Jan 2012 17:46:31 +0000 Andréa Fradin et Guillaume Ledit http://owni.fr/?p=93662

L’annonce était attendue. Le patron d’Iliad, la maison-mère de l’opérateur, n’a de cesse de le clamer depuis 2008 :

Nous pourrions diviser par deux la facture de téléphonie mobile.

Les offres promettaient d’être disruptives. Elles le sont. Tout comme l’engouement qui en résulte. Pas seulement dans la fidèle “communauté” des “Freenautes”, maintes fois remerciés, par Xavier Niel lors de la “keynote” de la matinée. Mais aussi dans les médias, auprès desquels Free bénéficie aujourd’hui d’une surprenante adhésion unanime, démontrant ainsi la puissance de sa force de frappe commerciale et marketing.

“L’entrée fracassante de Free dans le mobile”, “Évolution ou révolution” ? , “Le détail des futures offres”, des portraits hagiographiques ou des pages d’accueil prises d’assaut par de multiples articles et vidéos : l’information a bénéficié d’une exposition maximale (voir ci-dessous l’extrait de la une de La Tribune).

Sur Twitter, le hashtag annonçant le lancement de l’offre (#freemobile) atteint très rapidement le rang de “trending topic” – sujet le plus évoqué par les utilisateurs du site. Dailymotion, responsable de la couverture vidéo de l’événement, a compté jusqu’à 150 000 personnes simultanément connectées. Un carton.

Et ce sans campagne publicitaire classique. La communauté “geek” a été appâtée par des clins d’œil sur les réseaux tout au long du mois de décembre : langage “leet speak”, faux profils Twitter et diffusion de rumeurs. La machine a rapidement été mise en route, et ce sont les membres de cette communauté qui l’ont alimentée. Les médias traditionnels ont été pris par cette “Freemania”. Ayant déjà traité cette forme de communication originale, ils ont mis en place des dispositifs exceptionnels afin de suivre les annonces de Xavier Niel. Et cela semble répondre à une attente démesurée des lecteurs, tant les articles traitant le sujet ont connu des pics de trafic. Sur Twitter, le directeur des affaires règlementaires de Free, Alexandre Archambault, se vante d’avoir dépassé, avec Free mobile, le pic d’audience des sites de presse en 2011.

La com’ du chevalier blanc

S’il a été adoubé chevalier blanc des télécommunications par l’ensemble des médias, Xavier Niel n’a pas attendu la presse pour se faire pourfendeur du secteur. La rhétorique d’une altérité bienveillante incarnée par Free est le fil rouge de la communication de l’opérateur. En lançant son offre ADSL en 2002, il s’était fait sauveur de l’Internet fixe, fustigeant les marges et les ententes de la concurrence. Et le forfait “triple-play”, accès à Internet, téléphonie et télévision, dont il est à l’origine, a en effet changé le visage du secteur. En s’attaquant au mobile, Xavier Niel et ses équipes tentent de réitérer l’Histoire. En empruntant le même discours véhément, agressif ; bref, en opposition au club très fermé des gros opérateurs, dont ils font pourtant déjà partie sur l’Internet fixe.


Free se moque de ses concurrents montrés comme… par Nouvelobs

La vidéo de présentation de la conférence donne le la : “Free contre tous”. L’histoire de l’arrivée de Free sur le marché du mobile y est parodiée sur le modèle des messages à caractère informatif. En toutes lettres apparaissent les noms des patrons d’entreprises concurrentes, hostiles à l’arrivée d’un quatrième opérateur. Martin Bouygues (Groupe Bouygues), Jean-Bernard Lévy (Vivendi, maison mère de SFR), Franck Esser (SFR). Seul Stéphane Richard, directeur général de France Télécom/Orange est épargné. Nous aurons le temps d’y revenir. Free caricature ses rivaux, leur rentre dans le lard. A la limite de la diffamation. La voix nasillarde et moqueuse lance :

Condamnés en novembre 2005 à payer 534 millions d’euros pour s’être entendus dans le cadre d’un Yalta visant à maintenir leurs parts de marché respectives, les trois grand opérateurs français qui se partagent le pactole du téléphone mobile ont-ils vraiment fait amende honorable ? Rien n’est moins sûr.

Et de poursuivre en évoquant le “lobbying intense”, la “désinformation”, le travail de “désintox”, les “chausse-trapes” et “peaux de bananes” qui ont jalonné l’entrée de Free dans “l’univers impitoyable du mobile”.

En prenant la parole ce matin au siège de Free, Xavier Niel n’en démord pas, présente sa boite comme le trublion du secteur, un héros qui “rend du pouvoir d’achat à tous les Français” et qui “souhaite que tous [ses] concurrents s’alignent sur [lui].” A l’en croire, l’enjeu de Free Mobile n’est pas tant d’engranger de nouveaux clients, que de libérer les Français du joug des oppresseurs télécoms :

Donner une leçon à votre opérateur, venez chez Free ou demandez à votre opérateur de pratiquer les mêmes tarifs. On vous laisse le choix des armes.

Xavier Niel est allé jusqu’à comparer ce 10 janvier à la “Libération”. Emphase venant faire écho à un de ses tweets, publié hier, citant les vers qui avaient annoncé le débarquement. Rien que ça.

Free, plus Goliath que David

Free n’est pas un opérateur comme les autres. L’enthousiasme qu’il suscite repose-t-il également sur une stratégie industrielle à part ? A voir. Un peu à l’image d’un Apple face au géant Microsoft, ou d’un Google face à Yahoo, Free est aujourd’hui plus proche de Goliath que de David. S’il taquine encore les oligopoles en place, il doit composer avec la logique du milieu.

La proximité de l’opérateur avec Orange en est un bon exemple. Son patron Stéphane Richard, en plus de ne pas être moqué dans la vidéo d’introduction à la keynote, a été remercié par Xavier Niel en personne. Son passage à Bercy, entre 2007 et 2009, à la direction du cabinet de la ministre de l’Économie de l’époque Christine Lagarde, aurait joué en faveur de Free. Beaucoup, au sein de l’opérateur, se sont d’ailleurs réjouis de l’arrivée de Stéphane Richard à la tête d’Orange. Orange et Free, copains comme cochons ?

Outre les piques d’usage entre les deux boîtes et leurs représentants, les accords fusent. Sur la fibre, les deux opérateurs ont un accord de cofinancement des réseaux, portant sur une soixantaine de communes. Sur le mobile, c’est le réseau d’Orange dont Free profite pour combler sa couverture toujours partielle du territoire français (30 %). En mars 2011, les deux opérateurs ont signé un accord d’itinérance d’une valeur d’un milliard d’euros. Pour justifier ce rapprochement, Stéphane Richard explique qu’il ne voulait pas voir ce chiffre d’affaires additionnel aller dans la poche de la concurrence. Quitte à accepter, sur un réseau d’antennes qu’il estime déjà saturé, le forfait imposé dans les termes de Free ? Soit une consommation Internet plafonnée à 3 giga octets (bien plus que celle proposée chez Orange) et ouverte aux peer-to-peer et à la voix sur IP (services tel Skype), jusque là bannis (ou nécessitant un effort financier) du mobile.

De même, quand Xavier Niel est prompt à dénoncer “l’État” ou “Bercy”, il peut compter dans le même temps sur certains soutiens de poids. Du côté de François Fillon, également remercié en fin de présentation, ou du cabinet d’Éric Besson, le ministre de l’industrie et de l’Économie numérique. Qui s’est d’ailleurs “félicité” du “lancement commercial” de Free dans un communiqué. Si la course à la licence mobile a été longue et semée d’embûches, le “petit” opérateur a aussi su faire du lobbying, et s’entourer des bonnes personnes.

En l’état, l’offre de Free semble effectivement attractive pour le consommateur, comparée aux multiples forfaits des concurrents Orange, SFR et Bouygues Telecom. Moins chère, plus lisible (uniquement deux offres et une page de Conditions Générales de Vente) et dans le respect du principe de neutralité des réseaux. Déjà un progrès. Le patron de Free a néanmoins rappelé que les offres annoncées aujourd’hui ne constituent que des “produits d’appel”, destinées aux premiers abonnés. D’autres suivront, “Méfiez-vous !”, ironise Xavier Niel. Satisfait mais prudent, Edouard Barriero, en charge d’Internet au sein de l’association de consommateurs UFC-Que Choisir avertit à son tour : “Le diable est dans les détails”.


Voir aussi FreeMobile : combien ça coûte ?, la #data calculette d’OWNI pour comparer ce que vous paierez jusqu’à votre date de fin d’engagement, en conservant votre forfait ou en choisissant un forfait Free Mobile (frais de résiliation compris).

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Pratiquer la ville, pour une technologie de la dérive http://owni.fr/2011/06/20/pratiquer-la-ville-pour-une-technologie-de-la-derive/ http://owni.fr/2011/06/20/pratiquer-la-ville-pour-une-technologie-de-la-derive/#comments Mon, 20 Jun 2011 06:22:02 +0000 Matthieu Duperrex (Urbain, trop Urbain) http://owni.fr/?p=70408 Urban After All S01E20

La ville événementielle gagne du terrain. Publicitaires et “designers d’ambiance” apposent leur signature sur de nombreux domaines de l’urbanité. L’urbanisme de situation oriente de plus en plus nos parcours urbains, jusqu’à transformer la ville en parc à thèmes. Oui, nous en témoignons régulièrement au long de ces chroniques : par bien des aspects, la ville occidentale a digéré la subversion des situationnistes des années 1950, la critique du capitalisme en moins, le mot d’ordre marketé en plus. Alors, bien sûr, on accueille d’abord avec scepticisme les annonces d’applications « subversives » qui feraient de nos prothèses numériques du type iPhone des outils libertaires. Certains usages de technologies mobiles revendiquent en effet l’esprit situationniste et promettent une “appropriation” de la ville par ses habitants. Ils se réfèrent parfois expressément à la notion de dérive, qui est selon Guy Debord (théorie de la dérive, 1954):

Une technique du déplacement sans but. Elle se fonde sur l’influence du décor.

Que sont ces technologies de la « dérive augmentée » ? En quoi peuvent-elles être davantage que des gadgets anecdotiques ?

Outiller la lecture urbaine

Certaines applications mobiles oscillent entre la promenade aléatoire assez passive et la démarche créative. Il y a par exemple celle intitulée “HE”, pour “Heritage Experience”, qui permet de tourner et monter des films “marchés” à partir de fragments audiovisuels géolocalisés. On connaît par ailleurs les « soundwalks », qui sont souvent sages, mais se développent parfois en hacking sonore urbain. Et avant que tout un catalogue moderne d’applications pour smartphone se constitue, il y a eu des prototypes précurseurs. Les “Flâneurs savants” ont ainsi organisé des parcours de découverte dans le quartier du Marais avec des baladeurs. Les “Urban Tapestries” de Londres ont proposé une réforme de la relation au paysage urbain par le biais d’une application mobile.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La dérive trouve des ressources inédites dans certaines applications de téléphonie conçues pour ces usages. The Pop-Up City a fait une courte sélection des plus récentes. Se détachent Serendipitor, dont Pierre Ménard a fait un test pas forcément concluant, mais aussi Shadow Cities et son orientation “multiplayer”, Glow et sa cartographie des humeurs, et Mission:Explore, pour l’instant cantonné à Londres comme terrain de jeu.

Dans tout cela, l’intérêt consiste peut-être davantage dans la démarche de l’utilisateur que dans les possibilités techniques avancées. Ainsi que l’a souligné Nicolas Nova, qu’elle soit menée par des skateurs, des activistes ou des géographes, la dérive est une « technologie de lecture urbaine ». Elle est une pratique, plus ou moins outillée, d’interprétation nouvelle d’un milieu qu’on pensait entièrement balisé et normé. Que des utilisateurs se donnent des “consignes” de pratique de la ville (dont la liste est presque infinie) au travers de ces applications, là est le piquant de ce rapport induit à la technologie. Car ils inventent ainsi de nouveaux codes et « lisent » la ville de façon originale.

La dérive situationniste en cinq leçons

Devant la masse de cette offre mobile, il n’est pas inutile de rappeler que Guy Debord et les situationnistes ont institué la dérive comme une authentique méthode d’analyse urbaine. En voici les grands principes :

  1. D’abord, la dérive est selon eux le passage rapide entre des « ambiances urbaines ». La dérive se rattache à la démarche “psychogéographique”, laquelle prend avant tout la rue comme terrain d’observation (voir l’Essai de description psychogéographique des Halles, 1958).
  2. La psychogéographie a une portée critique : elle souhaite “provoquer la crise” du système de production de l’espace urbain (voir Potlatch N°5, 20 juillet 1954).
  3. La psychogéographie est en même temps une méthode de construction d’ambiances ; elle prône un « urbanisme mouvant » (je vous invite à retrouver sur Urbain, trop urbain un prolongement architectural de cette pensée).
  4. L’”investigation”, la “découverte” et la notion de “données” sont convoquées par Debord comme faisant partie de la psychogéographie (voir l’Introduction à une critique de la géographie urbaine, 1955).
  5. Enfin, le situationnisme promeut une « pratique habile des moyens de communication ». Et l’un de ses penchants les plus naturels est l’établissement d’une “cartographie rénovée” (voir les collages de cartes que Debord réalise avec Asger Jorn, dont le Guide psychogéographique de Paris, 1957)

De quel situationnisme les technologies mobiles sont-elles le nom?

Transition entre les ambiances, recours à l’affect, déambulation choisie, activisme et subversion, valorisation des data, emploi des moyens de communication à notre portée, détournement du code, urbanisme nomade et participatif, inventivité cartographique… Ces thématiques sont bien actuelles, voire brulantes. Qui pour s’étonner à présent qu’un courant de pensée des années 1950 soit revivifié par les nouvelles technologies que nous venons d’évoquer ? J’émettrais juste un petit moderato : les « situs » buvaient énormément de vin pour dériver. Pas sûr que le « bio-mapping » de Christian Nold, qui élabore des cartes sensorielles de la ville reflétant l’intensité émotionnelle de certains espaces (dans l’est de Paris par exemple), ait beaucoup tourné au pinard…

Ce qui diffère plus sérieusement de l’époque situationniste, c’est l’ambiguïté du mapping digital fondé sur la dérive. Car d’un côté, la géolocalisation, qui fait le ressort de ces applications mobiles, expose l’utilisateur à des instruments de “surveillance”; et de l’autre côté, un univers démocratique de données générées par les utilisateurs s’offre à notre navigation dans la ville. Entre panopticon et dérive créatrice, les technologies mobiles créent un étrange court-circuit (que le théoricien Antoine Picon rapporte même à une “crise de la cartographie urbaine”).

Autre différence d’avec l’époque situationniste : ces applications mobiles et leurs usages produisent un système des objets numériques dans lequel des relations de jeu, de chasse ou d’apprentissage se composent et se défont dans la ville. Avec la dérive, la navigation devient « sociale », mais les non humains numériques « socialisent » bientôt davantage que les humains. D’où le développement d’un « Internet des objets » annoncé dès 2005 par l’Union internationale des télécommunications (ITU), qui se superpose aux Internets des utilisateurs et des données.

Des pratiques de ville sur écrans de contrôle

Enfin, le réseau de mobiles peut se prêter à une nouvelle forme d’art. « Net_Dérive » de Petra Gemeinboeck et Atau Tanaka a fait date dans ce registre. Autour de la galerie Maison Rouge (Paris Bastille), trois prototypes de téléphones étaient « promenés » dans le quartier. Ils produisaient des relevés auditifs et visuels des déplacements traduits sur écran dans l’espace d’exposition.

Net_Dérive, en transposant les applications du social software (modèle des sites de rencontre) en des termes sonores (des mélodies, des variations d’intensités) et physiques (la proximité ou l’éloignement, la distance et la présence), réalise un hybride social, musical et spatial, qui propose d’écouter et de produire une musique à plusieurs, évoluant en fonction de variables comportementales personnelles. En transformant ensuite le téléphone mobile en transmetteur de données audio et visuelles en temps réel, l’outil de communication mute en appareil de mesure et donc, également, de contrôle.

L’interaction locale du téléphone et du paysage urbain recontextualise par bribes le récit d’une dérive qui demeure en quelque sorte toujours ouverte. La transition d’un espace à un autre se double d’une historicité : il y a des traces de la dérive, laissées dans le réseau, et qui ne demandent qu’à être mises à jour par de nouveaux utilisateurs. La dérive et le mapping débouchent ainsi sur un art de raconter des histoires. L’application Wanderlust repose d’ailleurs sur ce principe de “storytelling”.

La profondeur du récit de ville que cette dérive augmentée nous livre vient cependant selon moi, en dernière instance, de ce qu’un paysage symbolique fait déjà sens pour nous.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La situation, le récit, le web

Grâce aux dispositifs numériques de dérive augmentée, la fiction peut hybrider le réel de la ville. La création numérique peut être en ce sens porteuse d’autre chose que d’un simple design d’ambiance, c’est-à-dire porteuse de pratiques. De ce point de vue, les créateurs ont quelque chose à dire que ne disent pas nécessairement les foules mobiles, notamment au niveau du récit et de la fiction. Et justement, si le web conserve encore selon moi sur ce point une préséance sur les technologies mobiles, c’est parce qu’il tient la promesse de dérive par la narration plus que par la communication. Le champ du récit digital s’est élargi de nombreux exemples de formes plurielles et discontinues de l’image de la ville. La fenêtre de l’image-web est ainsi devenue porteuse d’une poétique topologique. Œuvre numérique complexe, le webdocumentaire incarne sans doute le mieux le déploiement d’une diversité d’éléments et d’outils à fictions dans l’espace des interfaces digitales.

Il serait trop long d’énumérer ici tous les beaux exemples de créations web qui se rattachent à la dérive. Je vous livre un scoop pour finir et pour illustrer mon propos. Le prochain webdocumentaire d’Arte tv s’appelle InSitu, “les artistes dans la ville” — lancement fixé autour du 10 juillet. Essai poétique, InSitu conserve la linéarité du récit, pour sa force et le déroulé d’un propos. Ce qui n’empêche pas les ressorts du « split screen » et les approfondissements médias désormais traditionnels au genre (POM, photographies, textes, cartographie, etc.) d’apporter un réel buissonnement des fables de la ville. Faire vivre une expérience urbaine en tant que fiction est l’une des ambitions de cet objet web qui vous entrainera même… dans le temps dilaté d’un récital de cloches en Espagne (dirigé par le campanologue — si, ça existe — Llorenç Barber). Dans InSitu, la dérive fait donc l’objet d’une maîtrise formelle et pour ainsi dire d’une plastique classique dont on attendait encore du webdocumentaire qu’il puisse s’en revendiquer sans honte devant ses aînés à gros budget. Le détournement y est pris en charge par la cartographie où viendront s’épingler les projets participatifs et les comptes-rendus de pratiques de l’espace urbain. Urbain, trop urbain s’efforcera d’accompagner un peu ce mouvement, et j’invite ici tous les amis que l’écriture de la ville inspire à nous rejoindre.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Le détournement et la dérive introduisent un jeu sur la valeur qu’on subvertit et renverse ; ainsi qu’un jeu sur l’expérience. Le web peut cela en tant qu’il outille les pratiques de la ville, qu’il ménage ce déplacement qu’est la fiction, et qu’il rend artistique l’espace de la lecture urbaine… C’est parce que le web existe et façonne symboliquement notre paysage urbain que les applications mobiles de dérive gagnent en profondeur et en subversion (en délinquance ?). C’est ainsi qu’on peut laisser Guy Debord conclure (La société du spectacle, 178) :

Dans cet espace mouvant du jeu, l’autonomie du lieu peut se retrouver, sans réintroduire un attachement exclusif au sol, et par là ramener la réalité du voyage, et de la vie comprise comme un voyage ayant en lui-même tout son sens.


Crédits photo: Flickr CC Phil Gyford, Julian Bleecker, wallyg

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L’avenir de la publicité est (totalement) numérique http://owni.fr/2011/03/21/l%e2%80%99avenir-de-la-publicite-est-totalement-digital/ http://owni.fr/2011/03/21/l%e2%80%99avenir-de-la-publicite-est-totalement-digital/#comments Mon, 21 Mar 2011 13:35:10 +0000 Sébastien Robin http://owni.fr/?p=52255 Vendredi 21 Janvier, dans un échange de mails avec Naro, celui-ci me demande si je ne veux pas faire un petit article ou un commentaire au sujet de la conférence à laquelle j’assistais ce matin là, IAB/TASC : les nouveaux leviers de l’achat display.

Sur le moment je fus surpris, d’une part Genaro est un très bon rédacteur, et il m’est difficile de faire aussi bien et aussi passionnant que ses articles et d’autre part je n’imaginais pas qu’il me demanderait de faire un article sur son blog. D’un autre côté, je n’ai pas hésité longtemps, voire pas du tout pour être honnête pour la simple raison que le sujet que je vais aborder me passionne, que Genaro connaît déjà ce sujet et s’il me demande d’en parler c’est qu’il partage mon opinion. D’autre part je lui dis souvent que rédiger des articles sur le marketing de facebook et twitter est plutôt facile, Genaro me lance donc un défi que je m’amuse (sérieusement) à relever.

Avant de me lancer je précise néanmoins je ne suis pas Maurice Levy, je n’ai pas de Rolex et je ne suis pas une personne habituée de la dernière de couv’ des pages saumon du Figaro. Je suis cependant un professionnel de la communication [digitale] depuis 12 ans, j’ai donc embrassé ce métier directement après mes études, je sais donc de quoi je parle (moi aussi).

J’affirme donc la chose suivante :

L’avenir de la publicité est numérique

et je vais m’appliquer à vous expliquer pourquoi.

La croissance des investissements en publicité numérique impose d’adapter l’organisation des agences

Mettons de côté les explications sur les faits suivants et considérons les comme des postulats :

  • Internet est devenu un média à part entière
  • les investissements en publicité sur internet sont en croissance soutenue depuis des années
  • les investissements en publicité sur internet ont dépassé les investissements en TV en Angleterre, et en France ils vont dépasser les investissements en radio sous peu

En conséquence de quoi on en déduit que le « numérique » est pris au sérieux. Les agences sortent d’ailleurs de beaux discours rassurants disant qu’elles “numérisent” leurs équipes, Genaro en parlait ici la semaine dernière.

Ce que je vais vous exposer ici, les patrons des agences médias, de pub etc.. l’ont compris :

  • ils doivent adapter leur savoir faire à l’évolution de la consommation des médias
  • de manière à garder ce savoir-faire qui leur fait gagner des clients et de la marge-brute.
  • Il est question de « numériser » l’expertise des personnes qui travaillent en agence sur les autres supports : papiers, affichage, radio , TV car ils se sentent perdus dans le monde numérique, ils ne savent plus répondre aux demandes de leurs clients qui en ont compris l’intérêt.

Je vous invite pour confirmer cela à lire l’article de Danielle Sacks intitulé « The Future of Advertising ».

L’avenir de la publicité est (totalement) Numérique

Explorons ensemble les fondements de la publicité numérique aujourd’hui.

Google, l’ogre de la publicité “search” / La communication dans l’instant

Google est une société qui dégage 99% de ses revenus de la publicité sur internet,  la principale mission de Google est d’apporter un service aux internautes qui soit un parfait réceptacle au… marketing des annonceurs.

Sur le marché de la publicité numérique, Google est un ogre, raflant en France environ 42% de tous les investissements effectués en publicité sur internet : environ 960 millions d’€ sur la France sur un total de 2.3 mds d’€ pour des publicités en liens sponsorisés. Les 58 % restant sont répartis entre les autres manières de communiquer online :

  • Display
  • Affiliation
  • Emailing
  • Mobile.

La « killer equation » de google repose sur un principe :

  • VOUS lui donnez vos termes de recherche
  • vous exprimez vos besoins du moment présent
  • et le moteur se charge de répondre immédiatement à vos besoins

8% des internautes cliquent sur les publicités display

La publicité graphique / display ne répond à aucun de vos besoins, elle est délivrée aléatoirement et sans rapport direct avec vos préoccupations, ces publicités sont vécues par les internautes comme une agression, un parasitage, une obligation dont ils se passeraient bien.

Des études Heatmap montrent d’ailleurs qu’au fur et à mesure les zones des bannières publicitaires sont évitées par les yeux, ce qui rend ces formats beaucoup moins performants pour les annonceurs. Surtout ceux qui communiquent en période de crise : aujourd’hui seuls 8% des internautes cliquent sur les bannières et génèrent 85% de tous les clics enregistrés (Etude comscore Natural Born Clickers).

La très courte période entre le moment où vous exprimez vos besoins et la réponse proposée est donc un des facteurs clés du succès de Google, et différence cruciale des liens sponsorisés par rapport aux autres formes de publicité sur internet qui garantit leur succès. Il est donc normal que les annonceurs aient ces dernières années augmenté leurs investissements sur les liens sponsorisés. (+9% encore en 2010).

Pourquoi ne pas communiquer 100 % en liens sponsorisés ?

Sur les liens sponsorisés, la communication pour une marque se résume à un bout de texte. Il lui est également nécessaire de travailler sur l’« image », une image de marque qu’il faut créer, entretenir ou renouveler. Sur le web cela s’effectue plus facilement avec du son et des images, les autres formes de publicités apportent sur internet une réponse à ce besoin des annonceurs, et ne disparaîtront donc pas.

Des études (Avenue A/Razorfish & yahoo) prouvent par ailleurs aux annonceurs qu’un mix de communication d’image et de liens sponsorisés est plus efficace que des liens sponsorisés seuls.

La publicité display connait sa révolution depuis 2 ans

Face à ces constats les professionnels de la publicité display ont imaginé de nouvelles solutions technologiques : les « adexchanges »

  • qui rendent l’achat/vente, la diffusion et le ciblage bien plus efficaces
  • augmentant par rebond les performances des campagnes display
  • et par conséquent l’intérêt des annonceurs (+12% croissance display 2010). Ce sont ces nouveaux leviers de l’achat display qui étaient évoqués jeudi dernier lors du colloque IAB.

Ces solutions technologiques apportent un vent de fraîcheur pour l’ensemble de la profession publicitaire numérique, dont les annonceurs, les agences mais aussi les éditeurs de sites qui tirent l’essentiel de leurs revenus de ces publicités display. Il y avait donc la foule des grands jours pour ce petit déjeuner professionnel (environ 120 personnes) où les principaux acteurs actuels du marché (Havas Digital, Orange AdMarket, Google Adexchange, Matiro, Rubicon Project, Mediamind) ont expliqué ce qu’étaient les Adexchanges et esquissé les changements à venir.

Les Adexchanges – La bourse de la publicité display

La principale information à retenir si l’on n’est pas versé dans ce milieu est la suivante : les adexchanges sont des plateformes automatisées d’achat / vente d’espace publicitaires. Pensez à la bourse (actions et obligations hein), remplacez les actions par des espaces publicitaires digitaux remplacez les banquiers par des éditeurs et des agences et vous obtenez les Adexchanges.

Les solutions qui se sont greffées autour - DSP/SSP/DMP… sont des satellites des solutions Adexchanges et proposent soit aux vendeurs, soit aux acheteurs, des outils permettant d’optimiser les performances ou les revenus des campagnes passant sur les adexchanges.

Il existe une 15aine de solutions Adexchanges présentes aux USA, seulement 3 en France actuellement mais pas des moindres  :

La publicité TV est appelée à utiliser les AdExchanges, en concurrence avec le web

Les adexchanges et solutions annexes modifient profondément la publicité online, que cela soit dans la manière d’acheter ou de vendre ses espaces publicitaires mais aussi dans la façon de préparer une campagne, dans la façon de se projeter les résultats futurs (côté annonceur) ou les revenus futurs (éditeurs.).

Cependant ces solutions n’ont pas que pour vocation d’être utilisées dans l’univers de la publicité numérique. En effet, si demain ce sont les TV et les radios qui seront numériques, les espaces publicitaires le seront donc également. C’est pour ces supports une véritable révolution que cela soit dans le métier mais aussi et surtout en terme de concurrence.

En effet les français ont beau avoir inventé le triple play et les box,depuis l’avènement de l’IP TV lors du CES 2010 les acteurs aux projets les plus ambitieux sont américains et s’appellent Google, Apple, Hulu etc.. Ces sociétés préparent ou ont lancé des projets de TV numériques (Google TV, Apple TV) qui seront demain disponibles au travers des box, au travers de l’accès internet et vous pourrez les regarder comme vous zappez aujourd’hui sur la TNT.

Le risque pour les TV est de perdre la main sur la mise à disposition de leur contenu et donc de voir leurs revenus publicitaires disparaître car ils ne maitriseront plus aucun levier de la chaîne : contenu, accès, outils et méthodes de ventes des espaces publicitaires.

On observe d’ores et déjà aux Usa l’éclosion de sociétés qui proposent d’acheter des espaces publicitaires sur des supports aussi variés qu’internet / le mobile / les billboards vidéos 4×3 ou plus, les chaînes de TV in store etc.. depuis son ordinateur personnel. Demain viendront s’ajouter à cela les supports TV et radios numériques.

Les médias sont tous numériques, les formats de publicité vont s’unifier

On pourrait penser que la presse sera épargnée ? Je n’en suis pas si sûr dans la mesure où les tablettes ipad & co comme mode de consommation des contenus sont en train de bouleverser la publicité des éditeurs qui sera demain entre les mains d’acteurs comme l’Appstore d’Apple qui ponctionne au passage 30% des revenus.

Je vous annonce donc que la publicité de demain sera totalement numérique et que cela aura un impact sur l’ensemble des métiers qui composent actuellement cet univers : les acheteurs / vendeurs, les créatifs. La révolution de la publicité sur le web et le mobile impactera demain les autres supports médias car tous ces supports se numérisent.

Article initialement publié par [Naro]Minded, propulsé par Genaro BARDY

Blog de l’auteurCompte Twitter de l’auteur

Crédit Photo Flickr CC : Marylise Doctrinal, Gilderic, Stéfan, Liloueve

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